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Edito

Le contexte de la formation professionnelle dans le champ du sport et de l’animation est depuis quelques années en profonde mutation. En effet, les enjeux, les acteurs et les budgets ont pris une envergure considérable sur fond de professionnalisation des organisations. De ce fait, les projets de formation dépassent largement la question de la qualification professionnelle. Ils deviennent alors de véritables leviers de changement et de progrès. Construit sur la base des projets de développement des structures sportives ou des mouvements de jeunesse, les projets de formation peuvent également traduire une politique locale ou nationale. La formation peut alors s’appréhender comme outil d’évolution et de mutation d’un champ social. Le Brevet Professionnel Activités Physiques Pour Tous décrit dans cet ouvrage est un exemple parmi d’autres projets de formation développés au sein du CREPS PACA qui symbolise cet état d’esprit. Il est le témoin d’une philosophie qui place la mission de formation au centre du développement des organisations sportives de cette jeune branche professionnelle. La vocation de ce guide n’est pas de présenter un projet exemplaire, il témoigne davantage d’une philosophie et d’un état d’esprit. Dépassant le vœu pieux de « l’adéquation Emploi/Formation », ce guide a vocation à faciliter la mise en œuvre d’une formation BP JEPS activités physiques pour tous au bénéfice des publics les plus éloignés de l’offre sportive traditionnelle. Cette démarche consiste à explorer toutes les dimensions du « POUR TOUS » en suscitant la pratique des femmes et plus largement de tous les membres de la famille. Concevoir et conduire des projets d’activités adaptés permettant au public féminin de venir pratiquer requiert des stratégies, des démarches et des outils qui dépassent le cadre fixé par le livret référentiel de la spécialité… L’accent est, ici, porté sur le rôle fondamental que doit jouer l’alternance dans l’acquisition des compétences du stagiaire : Un formidable levier de changement favorisant l’émergence de nouvelles formes et modalités de pratiques « POUR TOUS » Ce guide pourrait être également une aide précieuse sur les plans pédagogique et managérial pour tout individu souhaitant porter la question du sens au centre des démarches d’ingénierie de formation…

Formation et mixité

Préambule :

 

Les journées techniques (JT), proposées par le pôle ressources national « sport éducation mixités citoyenneté », sont des journées d’échange, de mutualisation et de formation, destinées aux professionnels et visant l’approfondissement et l’analyse critique des pratiques professionnelles.

Pour cette deuxième édition des JT, c’est le thème de la formation de l’encadrement comme levier de développement de la mixité dans le sport qui sera abordé.

 

La mixité, une volonté du ministère chargé des sports…

La question de l’égalité entre les hommes et les femmes préoccupe depuis de nombreuses années les institutions d’État. La mixité, c’est-à-dire le principe même qui va à l’encontre de la séparation des sexes semble s’imposer comme une étape vers l’égalité des sexes. Qu’en est –il réellement ?

Aujourd’hui c’est la recherche d’un meilleur équilibre entre les femmes et les hommes dans le champ sportif (parité dans les instances de gouvernance, place des femmes dans le sport de haut niveau et de la pratique sportive pour tous, sa représentation dans les médias…) qui prévaut. A ce titre cette recherche d’équilibre s’inscrit dans les priorités du plan d’action interministériel et, est au cœur de l’action du ministère.

La feuille de route égalité entre les femmes et les hommes du ministère fixe les principaux objectifs à atteindre en matière d’équilibre femme/homme

Or, de nombreuses mesures et actions se rapportent au secteur de la formation et ont commencé à être mises en place dès 2013.

 

La lecture de la feuille de route offre un éclairage spécifique :

Mesure 2 (accès à la pratique) – Action 4 – : Proposer des contenus pédagogiques adaptés aux différentes offres de formation (éducateurs bénévoles, éducateurs professionnels, arbitres,…) et qui visent à mieux prendre en compte l’égal accès des femmes et des hommes à la pratique d’APS.

Mesure 4 (Haut niveau) – Action 3 – : Renforcer les compétences de l’encadrement technique par l’identification et la prise en compte des spécificités des sportives de haut niveau ; augmenter la mixité dans l’encadrement technique des sportives de haut niveau.

Mesure 5 (lutter contre les discriminations) – Action 2 : Systématiser l’intégration d’un module d’information et de sensibilisation sur les violences et les discriminations, notamment celles à l’égard des femmes, au programme de formation des cadres sportifs.

Action 3 : Développer et promouvoir des outils de sensibilisation et d’information sur la lutte contre les violences et discriminations à l’égard des femmes sportives à destination des acteurs du champ sportif.

 

Un enjeu fédéral fort…

Des JPT « formation et mixité » répondent aux besoins générés par la mise en place des plans de féminisation. La formation constitue un des leviers possible de la féminisation actionné par les fédérations sportives. En effet 79,7% des plans utilisent le levier de la formation et déclarent organiser des formations spécifiques à la thématique : la formation constitue bien une des clés de réussite de la politique de l’Etat en faveur des publics éloignés du sport et notamment les femmes.

 

 

Comprendre pour mieux agir…

L’encadrement de la pratique sportive doit-il être mixte pour générer de la mixité sur les terrains de sport ? (théorie du modèle).

La mixité est-elle une condition suffisante de l’égalité ? Permet-elle d’accéder à l’égalité des sexes, valeur apparemment convoitée par notre société ?

 

L’enjeu de ces journées techniques dédiée « à la mixité dans les formations de l’encadrement » est de donner suffisamment d’éléments de compréhension sur les plans conceptuels, techniques et pédagogiques pour in fine, générer des formations qui favoriseront la mixité dans le sport.

 

La journée technique sera donc placée sous le sceau de l’alternance entre temps d’apports théoriques, concrets et de mises en pratiques, permettant à chacun à la fois de s’inscrire dans un réseau d’acteurs, et d’enrichir ses pratiques professionnelles

 


 

Organisation des JT

Temps 0 : Newsletter mixité et formation (Novembre 2014)

En amont de ces JT est prévue la sortie d’une newsletter (sortie prévue en novembre 2014) sur le sujet. En plus de communiquer sur les JT, la newsletter permettra de présenter, en avant-première, les initiatives qui seront développées lors de ces JT, d’accompagner la sortie du guide « lutter contre le sexisme dans métiers du sport et de l’animation » et de poser le cadre de la réflexion des JT

La newsletter sera aussi l’occasion de lancer un appel à mutualisation des outils formation.

 

29 janvier, INSEP, la journée sera organisée en 4 grandes séquences  :

 

LE MATIN

Attention : prenant en compte, les différents points de vue qui ont émis lors du 2ème copil, et qui concernent le temps 3 (parole de praticiens).nous proposons les 3 trois scenarii suivants :

 

Temps 1 : ouverture 30’

  • Valérie Berger –Aumont DSB1
  • PRN SEMC : point sur l’organisation
  • Myriam Chomaz –UNS Leo Lagrange Marraine de cette JT

Pierre Dantin : Professeur des Universités, Directeur du laboratoire de Recherche Sport MG Performance EA4670, Titulaire de la Chaire « Société, Sport et Management » de SCIENCES-PO Aix en Provence et AIX-MARSEILLE UNIVERSITE, membre du conseil scientifique de l’INSEP

  • Agnès Josselin : SDFE (droit des femmes) action de formation en direction de divers institutions ou organisations publiques ou parapubliques.

 

Temps 2 : Un regard extérieur et expert :

  • (Parole de l’entreprise) : Aline Crépin directrice de la RSE groupe Randstad.

Idée directrice : L’influence de la mixité sur la performance des entreprises

  • Parole d’expert de la mixité: Florence Abadie, conseiller jeunesse en DDCS, sociologue, elle s’intéresse particulièrement au concept de la mixité et aux conditions de sa réalisation.

 

Ce temps proposera des éléments de compréhension des enjeux de la mixité.

A partir de cette présentation, il sera ensuite possible d’aborder la problématique de la mixité de sexe sous l’angle de la formation (Temps 3)

 

Temps 3 : Parole de praticiens et échanges d’expériences

présentation des 3 initiatives qui seront support aux ateliers

Ce temps se fondera sur un partage d’expériences de la part de professionnels et de praticiens, qui porteront à la connaissance du public et au débat, des éléments de leurs pratiques professionnelles, qui serviront de base de travail aux ateliers de l’après-midi.

 

  • La formation intégrée aux plans de féminisation (pour l’atelier 1)

 

A partir du panorama des plans de féminisation

Idée directrice : illustrations (ex FOAD et voile), cibles et perspectives

Intervenants : Muriel Faure et M-F.Potereau

 

  • Les formations et /ou outils de formations qui utilisent l’approche intégrée de l’égalité Comment construire ses propres outils de sensibilisation ? (support de l’atelier 2)

 

Idée directrice : des contenus dédiés et une posture pédagogique qui permettent d’accompagner le changement.

Carole Péon pour la FFtri : L’expérience de la FFtri « Rejoins la tribu triathlon »: lutter contre les stéréotypes et les représentations qui freinent l’accès des femmes au triathlon est possible.

 

  1. La formation comme le levier de changement et comme levier de développement au service des organisations et de leur projet. Ici la mixité…

L’idée directrice : Présenter les initiatives menées sur des dispositifs BP/DE/DES par la FFEPMM et le CREPS PACA qui illustrent des projets de formation qui vont au-delà de la qualification professionnelle et qui sont de véritables leviers de changement et de progrès. Ils traduisent en même temps une politique locale ou nationale et constitue la base des projets de développement des structures sportives….

L’APRES MIDI

Temps 4 : Ateliers de travail

L’après-midi sera consacrée à la mise en place de plusieurs ateliers de travail thématiques, favorisant la mise en situation et l’échange entre professionnels.

 

Le nombre d’ateliers sera fonction du nombre de participants :

Proposition de faire découvrir un outil de formation

1-Mise en situation avec un outil de formation

2- Production collective sur un sujet

 

Proposition de thèmes à traiter en ateliers

Proposition de 3 thèmes différents qui peuvent facilement ouvrir vers une coproduction.

 

Atelier 1 : La formation intégrée aux plans de féminisation

Pilotage de l’atelier : DS/ Muriel Faure et M-F.Potereau

Base de travail : le panorama des plans de féminisation : diagnostic des formations proposé dans le cadre de ces plans. Existe-t-il d’autres perspectives d’utilisation de la formation ?

(Des exemples de formations intégrées aux plans de féminisation)

 

 

Atelier 2 : Construire ses propres outils de formation /sensibilisation.

Base de travail : présentation et passation d’outil de formation existant et mis en œuvre par certaines fédération (triathlon) ou groupement (Femix, PRN), dégagez des invariants pédagogiques (posture), repérer les mécanismes (ancrages conceptuels) et les enjeux, pour générer en groupe une proposition de séquence pédagogique.

L’atelier 2 peut être facilement doublé voir triplé en fonction du nombre de participants

Atelier 2A : Annie Valencot. Les outils de formation de Femix

Atelier 2B : Carole Péon : Exemple d’un outil de sensibilisation mis en place par La FFtri

 

 

 

Atelier 3 : L’ingénierie de formation.

Pilotage : Corinne Martin/Marylin Lots (EPMM)

Comment générer des dispositifs de formation qui s’inscrivent dans les priorités du plan d’action interministériel et qui sont au cœur de l’action du ministère ?

Base de travail : Les formations BP DE DES qui intègrent l’approche intégrée de l’égalité ou la mixité dans les cursus et qui se servent de l’alternance comme d’un levier de transformation de l’offre et de la demande.

 

Sport de haut niveau féminin

 

 

Par Stéphanie Cornu

 

La spécificité féminine dans l’accompagnement des parcours d’excellence et le manque de compétence des entraineurs à appréhender les sportives sont toujours au cœur du débat. Ce postulat de la spécificité féminine n’a jusqu’à maintenant véritablement pas été re-questionné. Pourtant c’est sur lui que repose notre conception stratégique de la performance féminine.

Or ce modèle propre à la femme peut apparaître comme un prêt à penser trop simpliste, en décalage avec l’exigence de la haute performance, et potentiellement contreproductif. Un collectif d’entraineur institué à l’échelle de la région PACA  a bien voulu réfléchir à leur pratique professionnelle en partant du concept de la singularisation de la performance. Voici en quelques lignes, la présentation d’une vision alternative du sport de haut niveau féminin, vision qui intègre la dimension complexe et ouvre vers de nouvelles perspectives de travail.

Retour sur le paradigme de la spécificité féminine

 

Nombreux sont les témoignages d’entraineurs qui indiquent qu’entrainer les filles, c’est plus compliqué, cela nécessite des savoirs être et des savoir-faire particuliers, de la diplomatie, de la sécurité donc des compétences particulières[1].

Cette expérience partagée a conduit la communauté sportive à valider l’idée selon laquelle : «la performance sportive féminine est spécifique et doit faire l’objet d’une stratégie différenciée »

 

Incidence sur un plan pratique :

 

Ainsi, c’est la personnalisation des parcours d’excellence sportif pour l’athlète féminine et son accompagnement qui sont régulièrement proposés avec leur corollaire de pistes d’amélioration (exposées en trois points). Toutes reposent sur le dogme de la spécificité de l’entrainement des sportives

 

Point 1 : La poursuite de l’effort d’amélioration de la qualité de l’environnement de la sportive de haut niveau.

 

A court terme, la direction des sports et l’INSEP sont très attentifs aux conditions de préparation des sportives respectivement sur le plan socioprofessionnel et sur les aspects sportifs.

A moyen terme, l’enjeu est de mieux accompagner les fédérations dans la définition de leur stratégie de formation et de préparation des sportives de haut niveau pour l’olympiade 2012-2016. Sur la base d’un diagnostic partagé, un questionnement poussé devra leur permettre de faire des choix durables qui se déclinent sur l’ensemble des paramètres de la performance : entraînement, suivi socioprofessionnel, accompagnement financier…

Point 2 : Le renforcement des compétences de l’encadrement des collectifs féminins est un second chantier.

Il est envisagé la création d’un groupe d’entraîneurs qui intervient sur les collectifs féminins afin de favoriser leurs échanges d’expériences et de rompre leur relatif isolement. Il sera également fait appel à des intervenants extérieurs pour alimenter leurs réflexions sur les différents paramètres de l’entraînement.

Point 3 : Il faut identifier les fédérations sportives où il est souhaitable qu’une stratégie différenciée soit adoptée en raison d’un décalage du niveau de performance homme/femme qui ne permet pas un travail en mixité.

En conséquence, une progression du niveau des meilleures sportives passe actuellement encore par l’inscription des spécificités de l’entraînement féminin dans la culture de l’encadrement fédéral. Les éléments contribuant à la performance des sportives présentent un intérêt d’autant plus important qu’ils sont partagés, échangés et communiqués à tous les niveaux de pratique. Ils doivent être mobilisables par les techniciens pour permettre l’émergence de jeunes championnes mieux formées pour réussir au niveau international.

Pour cela la définition d’un contenu de formation relatif à l’entraînement féminin permettra de l’intégrer aux contenus de la formation initiale et continue des entraîneurs.

La cohorte de solution envisagée se construit bien à partir du postulat de la spécificité de l’entrainement des femmes. Plus de contraintes, nécessitant plus de compétences et moins valorisé… c’est l’équation telle qu’elle est posée actuellement par les acteurs en charge de l’accompagnement des sportives vers la performance.

 

Incidence sur le sens

« On ne sait pas entraîner les filles ».

« Il faut apprendre à manager les filles ».

« Les filles, c’est compliqué…».

Entrainer les femmes c’est plus compliqué, c’est moins valorisant et moins valorisé, cela nécessite des adaptations, des savoirs faire et des savoirs être particuliers… Derrière ce constat empreint de pessimisme, se jouent d’autres enjeux plus pernicieux.

Qu’est-ce qui se joue implicitement avec le postulat de la spécificité féminine ?

La féminité… notre conception de la féminité, fruit de l’éducation qui est « en-jeu »et le sport féminin (en général, et qui plus est, quand il est de haut niveau !) nous renvoie sans cesse à interroger notre propre conception de  la féminité. Or c’est bien notre modèle de la féminité qui est remis en cause dans la pratique d’un sport à très haut niveau. La force, la vitesse, la domination, sont l’apanage de l’excellence sportive. Or, toutes ces qualités sont inscrites au registre de la masculinité. Tandis quela féminité se résume « à l’art de se faire tout petite » (Simone de Beauvoir)

Depuis les années 1970, une multitude de travaux se sont axés sur les perceptions du masculin et du féminin. On en a conclu que les caractéristiques que l’on attribue au masculin et au féminin sont une construction sociale.

Tous les travaux qui ont été faits depuis ont toujours abouti au même résultat. Globalement, et indépendamment des catégories sociales, il y a l’idée que le féminin et le masculin se répartissent en deux grands pôles :

  • le pôle « agentique », associé à l’homme, renvoie à l’action, à la force, à la domination ;
  • le pôle « communal » ou « communicationnel », associé à la femme, renvoie à des capacités d’écoute, de compréhension, de communication.

Ces deux pôles sont extrêmement stables, leurs contenus peuvent éventuellement varier d’une catégorie sociale à l’autre mais on retrouve toujours les mêmes distinctions. Indépendamment des études et des pays, d’ailleurs.

Pascale Molinier[2] personnalité est venue étayer par ses travaux, cette prise de conscience. Elle a montré par exemple, que plus de 80% des répondants accordaient d’emblée aux femmes des qualités de douceur et aux hommes, des qualités de force. Cependant, ce qui change, c’est l’équilibre entre les deux.

Or, si nous avons tous de bonnes raisons d’accepter les stéréotypes de genre (car Il faut bien comprendre que les stéréotypes sont des croyances qui structurent les rapports sociaux) dans le même temps, ces stéréotypes deviennent de véritables freins à la réalisation même de la performance, il convient donc de tout faire pour s’en affranchir.

Les contre-performances sportives féminines, les plaintes récurrentes des entraineur(e)s qui révèlent une apparente complexité à accompagner les sportives doivent questionner les pratiques des entraineur(e)s.

Plus de contrainte et moins de reconnaissance est le point de départ d’un système qui ne fera que « tomber en marche »… il est temps d’innover quitte à bousculer.

 

 

Changement de paradigme et singularisation de l’entrainement

Appréhender les sportifs et sportives à partir de codes de comportement normés selon l’appartenance à un sexe (et donc stéréotypé) n’est-il pas nier le « statut » en dehors des normes du sportif ou de la sportive de haut niveau ? D’ailleurs, n’entendons-nous pas régulièrement tel entraineur vanter le comportement exemplaire et typiquement masculin d’une athlète qui performe ?

La singularisation de l’entrainementest un nouveau concept développé et né du partenariat entre le Pôle ressources national SEMC et l’Unité de préparation mentale du CREPS PACA[3].

Le travail de recherche qui a été entrepris consiste à envisager le sport de haut niveau avec une perspective de genre. L’approche par le genre,  qui a émergé ces dernières années, ouvre de nouvelles perspectives, aux femmes et aux hommes, dans la construction d’une société plus juste et plus égalitaire.

Le genre caractérise tout ce qui n’est pas biologique, a savoir les attributs psychologiques, les comportements, les attitudes, les rôles sociaux de chaque sexe. Le concept de genre renvoie aux caractéristiques attribuées et prescrites à chacun des deux sexes (pression sociale et mise en conformité aux rôles sociaux de sexe[4]). Là  où il y a catégorie de sexe, il y a hiérarchie… et il y a oppression de l’une sur l’autre. Leur remise en question ne manque donc pas d’intérêt.

Néanmoins, l’approche de genre est devenue aujourd’hui un sujet polémique, et il est nécessaire de prendre le temps de remettre un peu de bon sens au cœur de ce débat à fort enjeu.

Selon moi, l’approche de genre n’est pas à considérer comme un nouveau dogme mais plutôt comme un nouveau cadre de référence. L’approche de genre est une clé d’entrée vers la compréhension des mécanismes du déterminisme qui contingentent nos propres comportements individuels et nos interactions.

L’approche de genre est aux rapports sociaux de sexe, ce que la physique quantique est à la compréhension du monde  phénoménologique.

En fait, je me plais à considérer l’approche de genre en faisant  un parallèle avec la physique quantique, car elles ont de commun d’être nées de l’impérieuse nécessité d’expliquer quelques phénomènes en violation avec la réalité.

Il s’agit d’une véritable révolution qui s’opère sur notre organisation interne, notre  monde intérieur, et dans le même temps sur nos rapports à « l’autre ». Cette révolution est donc individuelle et collective et comme toute révolution, elle est accompagnée de son lot de résistance au changement.

La résistance au changement est certainement aussi forte que le changement visé est profond. Ce qui est en jeu dans l’approche de genre, s’apparente à ce que certains auteurs ont appelé « empowerment »[5]. Littéralement, il s’agit de redonner le pouvoir aux individus de décider de leur propre trajectoire, de s’émanciper des rôles sociaux assignés au sexe.

Parce qu’elle invite à rompre avec une vision du sport hérité de l’histoire, parce qu’elle invite à re-questionner nos représentations, certitudes et nos modèles, l’approche de genre appliquée au sport constitue la voie royale vers le processus de changement, le moteur à l’émancipation et à l’innovation.

Ainsi mon parti pris sur le sport de haut niveau est d’encourager un autre regard sur la relation entraîneur-sportive par le concept du Gender Study

Il est aujourd’hui nécessaire d’appréhender ses questions (en convoquant des approches multidisciplinaires) et tendre vers un genderstudy[6]<s/up> appliqué au sport.

De façon plus pragmatique, une action de formation à destination des entraineurs est réalisée en partenariat avec l’unité de préparation mentale du CREPS PACA. Elle utilise les techniques du théâtre pour venir questionner la féminité et la masculinité en chacun de nous indépendamment du sexe.

Permettre aux individus quels qu’ils soient de s’approprier ces qualités féminines et masculines  sans poids de norme injonctives et prescriptives, c’est finalement désexuer ces qualités qui, bien loin d’être masculines ou féminines, sont uniquement humaines. La société semble donc plus en prise avec une discrimination du principe féminin plus qu’une discrimination des femmes.

 

 

 

 

 

 


[1]Quintillan Ghislaine, Les cahiers de l’INSEP, Sport de haut niveau Féminin N°4, INSEP, 2008

[2]·Pascale Molinier est une psychologue française dont les recherches se situent dans le champ de la psychodynamique du travail et de la psychosociologie

 

[3]Se reporter à Olivier GUIDI, en seconde partie

[4] Elise VINET, Émergence, perspective et mise à l’épreuve contemporaine du constructivisme sexué, Connexion, 1998

 

[5]Au plan individuel, Eisen (1994) définit l’empowerment comme la façon par laquelle l’individu accroît ses habiletés favorisant l’estime de soi, la confiance en soi, l’initiative et le contrôle.

[6] Apparues dans les années 70 aux États-Unis, les genderstudies ont profondément renouvelé l’étude des rapports homme/femme en posant que la différence de sexe est une construction sociale.